Les monuments français au firmament du cinéma
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Les monuments français au firmament du cinéma
Compte rendu
Les monuments français au firmament du cinéma
| 30.12.10 | 16h17 • Mis à jour le 30.12.10 | 16h20
Les décors en carton-pâte du film "Notre-Dame-de-Paris" (1956) de Jean Delannoy.© Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr
Gérard Depardieu déambulant dans les cachots de la Conciergerie dans Danton, d'Andrzej Wajda, est une scène doublement historique. Très peu de films furent tournés dans ce lieu qui servit de prison lors de la Révolution française. Revanche du palais de la Cité : la salle des gens d'armes abrite une belle exposition sur l'utilisation du patrimoine architectural français par le cinéma. Son commissaire, N. T. Binh, en a fait à la fois une promenade ludique dans laquelle les décors historiques que sont châteaux, cathédrales, monuments apparaissent comme les acteurs des films, et une initiation aux métiers du cinéma dévoilant l'envers des décors.
Affiches, photos, maquettes, costumes, extraits de films : la curiosité du visiteur est satisfaite, comme lorsqu'il découvre différentes armures ayant servi aux films de Victor Fleming, Jacques Rivette ou Luc Besson consacrés à Jeanne d'Arc. Au-delà de cette exhumation d'objets et de documents, l'accent est mis sur le travail des techniciens, l'édification de ces sites au statut de stars. Binh orchestre un parcours où le monument est tour à tour monument historique, personnage de fiction, acteur de composition, guest-star ou inspirateur de châteaux imaginaires.
Prenons le château de Versailles, partenaire privilégié des films consacrés à Marie-Antoinette. Dans la version de Van Dyke avec Norma Shearer (1938), il est reconstitué en studio. Pour Jean Delannoy, il accueille Michèle Morgan (1955) dans ses murs. Dans le film de Sofia Coppola (2006), les appartements de la reine sont filmés au château de Millemont.
Autre exemple : aucun film conçu autour de Notre-Dame de Paris n'a jamais été tourné en décors réels. Le film de Jean Delannoy adapté du roman de Victor Hugo (1956) montre un Moyen Age fantasmé, Quasimodo y joue devant des façades de carton-pâte. Dans La Reine Margot de Patrice Chéreau (1994), le mariage d'Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, qui eut lieu dans la cathédrale, a été tourné dans la basilique de Saint-Quentin, dans l'Aisne.
Vatel de Roland Joffé (2000) est censé se dérouler au château de Chantilly, demeure du prince de Condé. Restauré au XIXe siècle, ce site se révéla une mine d'anachronismes. Les réjouissances chères au grand organisateur des fêtes et des festins furent recrées dans treize châteaux différents.
Eugène Viollet-le-Duc est l'un des héros de cette exposition, lui qui réinventa les gargouilles de Notre-Dame et restaura la cité médiévale de Carcassonne, où se tournèrent entre autres La Merveilleuse Vie de Jeanne d'Arc, de Marco de Gastyne (1929), (pour figurer Orléans), Le Miracle des loups, de Raymond Bernard (1924), (pour figurer Beauvais), le Robin des bois, prince des voleurs, de Kevin Reynolds (1991), ou Les Visiteurs, de Jean-Marie Poiré (1993).
Les studios Disney qui engagèrent des artistes formés en Europe s'inspirent du château de Pierrefonds (Oise) pour La Belle au bois dormant et de dessins de Gustave Doré pour Le Monde de Narnia. L'exposition est dédiée à Eric Rohmer, qui recréa le Paris de l'époque de L'Anglaise et le Duc (2001) à partir de tableaux et toiles peintes incrustés en trucage numérique. Elle rend hommage à ces grands décorateurs que furent Trauner, Wakhévitch, Douy, Evein, Saulnier (le créateur du château de La vie est un roman d'Alain Resnais, en 1983). Elle démontre, dit Binh, que "le monument imaginaire s'inspire du réel, l'idéalise, le transfigure".
"Monuments, stars du 7e art", à la Conciergerie, 2, bd du Palais, Paris-1er. Tél. : 01-53-40-60-80. Jusqu'au 13 février 2011, tous les jours de 9 h 30 à 18 heures sauf le 1er janvier. Catalogue (éd. du Patrimoine, 200 p., 45 €)
Jean-Luc Douin
Article paru dans l'édition du 31.12.10
Les monuments français au firmament du cinéma
| 30.12.10 | 16h17 • Mis à jour le 30.12.10 | 16h20
Les décors en carton-pâte du film "Notre-Dame-de-Paris" (1956) de Jean Delannoy.© Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr
Gérard Depardieu déambulant dans les cachots de la Conciergerie dans Danton, d'Andrzej Wajda, est une scène doublement historique. Très peu de films furent tournés dans ce lieu qui servit de prison lors de la Révolution française. Revanche du palais de la Cité : la salle des gens d'armes abrite une belle exposition sur l'utilisation du patrimoine architectural français par le cinéma. Son commissaire, N. T. Binh, en a fait à la fois une promenade ludique dans laquelle les décors historiques que sont châteaux, cathédrales, monuments apparaissent comme les acteurs des films, et une initiation aux métiers du cinéma dévoilant l'envers des décors.
Affiches, photos, maquettes, costumes, extraits de films : la curiosité du visiteur est satisfaite, comme lorsqu'il découvre différentes armures ayant servi aux films de Victor Fleming, Jacques Rivette ou Luc Besson consacrés à Jeanne d'Arc. Au-delà de cette exhumation d'objets et de documents, l'accent est mis sur le travail des techniciens, l'édification de ces sites au statut de stars. Binh orchestre un parcours où le monument est tour à tour monument historique, personnage de fiction, acteur de composition, guest-star ou inspirateur de châteaux imaginaires.
Prenons le château de Versailles, partenaire privilégié des films consacrés à Marie-Antoinette. Dans la version de Van Dyke avec Norma Shearer (1938), il est reconstitué en studio. Pour Jean Delannoy, il accueille Michèle Morgan (1955) dans ses murs. Dans le film de Sofia Coppola (2006), les appartements de la reine sont filmés au château de Millemont.
Autre exemple : aucun film conçu autour de Notre-Dame de Paris n'a jamais été tourné en décors réels. Le film de Jean Delannoy adapté du roman de Victor Hugo (1956) montre un Moyen Age fantasmé, Quasimodo y joue devant des façades de carton-pâte. Dans La Reine Margot de Patrice Chéreau (1994), le mariage d'Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, qui eut lieu dans la cathédrale, a été tourné dans la basilique de Saint-Quentin, dans l'Aisne.
Vatel de Roland Joffé (2000) est censé se dérouler au château de Chantilly, demeure du prince de Condé. Restauré au XIXe siècle, ce site se révéla une mine d'anachronismes. Les réjouissances chères au grand organisateur des fêtes et des festins furent recrées dans treize châteaux différents.
Eugène Viollet-le-Duc est l'un des héros de cette exposition, lui qui réinventa les gargouilles de Notre-Dame et restaura la cité médiévale de Carcassonne, où se tournèrent entre autres La Merveilleuse Vie de Jeanne d'Arc, de Marco de Gastyne (1929), (pour figurer Orléans), Le Miracle des loups, de Raymond Bernard (1924), (pour figurer Beauvais), le Robin des bois, prince des voleurs, de Kevin Reynolds (1991), ou Les Visiteurs, de Jean-Marie Poiré (1993).
Les studios Disney qui engagèrent des artistes formés en Europe s'inspirent du château de Pierrefonds (Oise) pour La Belle au bois dormant et de dessins de Gustave Doré pour Le Monde de Narnia. L'exposition est dédiée à Eric Rohmer, qui recréa le Paris de l'époque de L'Anglaise et le Duc (2001) à partir de tableaux et toiles peintes incrustés en trucage numérique. Elle rend hommage à ces grands décorateurs que furent Trauner, Wakhévitch, Douy, Evein, Saulnier (le créateur du château de La vie est un roman d'Alain Resnais, en 1983). Elle démontre, dit Binh, que "le monument imaginaire s'inspire du réel, l'idéalise, le transfigure".
"Monuments, stars du 7e art", à la Conciergerie, 2, bd du Palais, Paris-1er. Tél. : 01-53-40-60-80. Jusqu'au 13 février 2011, tous les jours de 9 h 30 à 18 heures sauf le 1er janvier. Catalogue (éd. du Patrimoine, 200 p., 45 €)
Jean-Luc Douin
Article paru dans l'édition du 31.12.10
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